Trois questions à Mady Bâ, incident manager COVID-19
Le bureau de l’OMS s’est engagé aux côtés de l’État du Sénégal, pour faire face à la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). Conformément au cadre de la riposte face aux évènements de santé publique par l’Organisation, un système de gestion de l’incident a été mis en place et un « Incident Manager » (IM) nommé, en la personne du Dr Mady Bâ, médecin militaire. Il nous donne des détails sur cette fonction importante.
Dr Mady Bâ, qu’est-ce qu’un Incident Manager?
« Incident Manager », est un terme anglais qui peut être traduit en français par Gestionnaire de l’incident. Celui-ci est à la tête d’un « Incident Management System » qui se traduit en français par Système de gestion de l’incident (IMS). Ce système est une approche standardisée de gestion de l’action proposée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en collaboration avec d’autres organisations, comme les CDC (Ndlr : Center for Disease Control and Prevention, agence du gouvernement américain chargée de la prévention, de l’étude et du contrôle des maladies). Il a été inspiré des forces armées.
Ce système est modulable en fonction de l’événement à gérer. Il comprend principalement une direction, assurée par l’Incident Manager et différents piliers ou domaines pour la riposte à savoir : la coordination opérationnelle ; la surveillance épidémiologique, les portes d’entrée, le laboratoire ; les équipes d’intervention rapide ; la prise en charge des malades ; la prévention et les contrôle de l’infection ; la communication de risque et l’engagement communautaire ; la logistique et les opérations.
En tant qu’Incident Manager, j’assure la coordination globale des actions de riposte à l’événement sanitaire en cours, en appui au pays.
L’intérêt de disposer d’un Incident Manager vise à mieux organiser et coordonner la riposte face à un événement de santé publique donné avec une chaîne de commandement bien codifiée, des procédures claires et une bonne circulation de l’information. Dans le type d’événement actuel, il est important que chaque acteur sache ce qu’il a à faire, quand il doit le faire et comment le faire.
Quelles sont vos activités quotidiennes en tant qu’Incident Manager ?
En tant qu’Incident Manager, il me revient d’assurer une mise en œuvre harmonieuse et cohérente des interventions de l’OMS pour chaque pilier en appui au pays et en fonction de l’évolution de la situation. Je m’assure que les stratégies identifiées par le Sénégal, sur la base des recommandations que nous faisons, sont mises en œuvre de la manière la plus efficace possible. A ce titre, nous participons aux instances de coordination mises en place par le gouvernement et aux activités de riposte pour y apporter notre expertise. Aussi, au sein du bureau de l’OMS, nous faisons en sorte que les responsables de piliers collectent et analysent toutes les informations produites, afin d’évaluer les tendances, dégager les défis et formuler des recommandations. Les résultats de nos analyses, les enjeux et les propositions de recommandations sont portés au Représentant Résident de l’OMS et les éléments de plaidoyer envers les autorités sanitaires sont dégagés. Outre l’expertise technique pour les interventions de riposte, nous mobilisons les partenaires pour accompagner l’État du Sénégal dans la riposte.
J’avoue que c’est un travail exaltant et assez prenant, parce qu’il faut faire en sorte que tous les piliers travaillent ensemble de façon étroite, avec une transversalité. Il est important d’être alerte par rapport au suivi et à la gestion de l’événement sanitaire. C’est une fonction qui demande beaucoup de soutien en arrière-plan.
Vous avez mentionné les difficultés qui ne peuvent pas manquer. Quels sont les points de satisfaction que vous avez notés à ce stade de la riposte?
De manière générale, cet événement sanitaire montre à souhait la capacité d’adaptation et de résilience du système de santé sénégalais. Cela est assez réconfortant, parce qu’il faut l’avouer, c’est la première fois que le pays est confronté à un évènement d’une telle ampleur.
L’expérience d’Ébola en Afrique de l’Ouest, notamment au Sénégal a servi, même si le pays n’avait pas été trop impacté par cette maladie. Nous avons essayé de bâtir un système de gestion des urgences sanitaires, et à l’épreuve, on se rend compte que même si tout n’est pas parfait, ce système réagit assez bien par rapport à la gestion de cet incident.
Sur le plan personnel, la satisfaction que je peux noter est la nouvelle expérience que je vis. C’est la première fois que je joue ce rôle. En fait c’est une mise en pratique de formations que j’ai reçues au sein de l’Organisation. Cette expérience est gratifiante parce qu’on se rend compte qu’on apprend toujours. De la théorie à la pratique, ce n’est pas toujours la même chose ; ce qui fait qu’on se bonifie à travers la mise en situation.
J’ajoute à ces points de satisfaction le fait de travailler avec une équipe qui m’apporte un appui efficace et cela facilite la fonction que j’exerce, sans oublier la bonne collaboration avec les services techniques du Ministère sans laquelle rien n’aurait été possible.